Un outil de case management vu par son product owner
Le département d’une grande banque française en charge de la bonne adéquation entre les missions et objectifs stratégiques de la fonction de conformité, ambitionne la conception et mise en place d’un nouvel outil unique de « case management » de lutte anti-blanchiment au sein du groupe. Cet outil est conçu par l’équipe responsable du suivi et de l’évolution de différents outils de lutte anti-blanchiment, plus précisément la maîtrise d’ouvrage (MOA). Il devra couvrir l’ensemble des processus français et internationaux permettant de lutter contre les circuits financiers clandestins, le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Répondant ainsi à l’appellation générique de « case management AML » (Anti-Money Laundering).
L’outil souhaité a pour objectif la centralisation, l’investigation et la déclaration le cas échéant de dossiers de blanchiment à risque élevé, ainsi que le suivi et la recherche relative à des relations d’affaires dans le groupe. Le but recherché est l’optimisation des processus et la dématérialisation de données tout en automatisant les traitements actuels.
Aussi, on dissociera dans cet outil deux types de case management :
- « Total » : ouvert aux entités de sécurité financière, et permettant de réceptionner, investiguer, analyser et déclarer des cas de suspicion,
- « Réduit » : offrant aux correspondants français et internationaux la possibilité d’instruire et d’envoyer à la cellule de sécurité financière centralisée (située en France), les dossiers de suspicion avérée ou non.
Les dossiers constitués pourront être issus de deux objectifs distincts :
- La centralisation de suspicions avérées et déclarées par ailleurs à l’autorité de régulation du ministère financier national (France et monde),
- La détection d’un élément suspicieux au sein de la banque à déclarer. Ce cas fait l’objet d’une proposition de soupçon à déclarer. L’analyse de la proposition se fait par le biais du dossier créé dans l’outil. Si la suspicion est avérée, des éléments du dossier feront l’objet d’une déclaration au ministère des finances locales.
Dans les deux cas, les informations des dossiers sont exploitées lors des enquêtes de suspicion financière. Ces données sont relatives à un client physique ou moral, considéré comme suspect, et sont catégorisées en :
- Données personnelles : état civil, adresses, contacts (téléphone, fax, email, site Web),
- Données financières : opérations, comptes, contrats, entité du réseau de la banque en relation avec le client suspect.
Des fonctions de comparaison, complétées d’une analyse manuelle, permettent l’identification de liens entre toutes ces informations qui sont dématérialisées en éléments indépendants (« objets uniques »). Ceci rend les investigations financières, menées dans le cadre de la lutte antiblanchissement, plus pertinentes ; notamment au travers d’une représentation graphique des connexions entre « objets ». L’outil sera d’abord déployé aux entités françaises de sécurité financière et aux correspondants associés, puis progressivement à l’international pour les pays le désirant. Les États-Unis ont d’ores et déjà exprimé leur besoin avec une échéance 1 an. Sa conception a pour objectif le remplacement d’un progiciel existant, et donc a minima proposer aux utilisateurs un fonctionnement semblable avec diverses améliorations.
Ainsi, seront repris les concepts de :
- dossiers, constitués d’ « objets uniques » et de liens entre ces derniers,
- représentation graphique de liens,
- case management total,
- déclaration réglementaire (actuel : report manuel des informations déclarées dans l’outil).
Et seront proposés en complément :
- le case management réduit,
- la vérification des liens entre les informations, sur une base centralisée,
- la conception ainsi qu’une interface évolutive pour ouvrir les cases management « total » et « réduit » à l’international,
- l’automatisation du formulaire de déclaration réglementaire,
- les Workflows permettant de mieux cadrer l’activité opérationnelle.
Face à des exigences de contrôle financier américain, plus restrictives qu’en France, la banque française a défini un programme constitué de projets d’évolutions applicatives, d’automatisations de processus et de mise en place d’un nouveau service de sécurité financière aux États-Unis. La conception du nouvel outil de case management est un des projets de ce programme visant à centraliser et harmoniser les informations en matière de sécurité financière.
Ce projet comprend la création d’un outil pour remplacer un progiciel existant et inclut une reprise de données. Il est réalisé en mode forfait avec un Centre de Service Bancaire selon la méthodologie AGILE1 soit 22 sprints de 2 semaines. Les sprints en AGILE correspondent à une période durant laquelle sont définis, réalisés, testés et validés des users stories (U.S.) qui correspondent à des exigences utilisateurs. Le principe étant d’avoir, à la fin de chaque période, une partie de l’outil finalisée et prête à être livrée en production. Le nombre de sprints nécessaires au projet est calculé en fonction d’une première estimation faite lors du cadrage.
La conception menée au fil de l’eau par le product owner (P.O., responsable du produit final), s’attache principalement à l’analyse des besoins des futurs utilisateurs en fonction des thématiques à traiter ; et de « la capacité à faire » par sprint, d’un point de vue réalisation. Ces utilisateurs sont sollicités a minima une fois par semaine afin d’échanger sur les sujets d’actualité et de les sensibiliser à la recette souhaitée par sprint, au-delà des tests menés par la MOA.
L’équipe projet est constituée de différents acteurs incluant des spécialistes du progiciel à remplacer, d’experts en gestion de projets et des ressources « autres » sur le périmètre concerné, permettant d’avoir du recul sur la conception et l’organisation projet qui évolue en fonction des rétrospectives sur les sprints. Cette dernière est un évènement qui a lieu à chaque fin de sprint et permet à tous les intervenants du projet d’exprimer les difficultés et points positifs rencontrés durant la période écoulée. À son issue, des axes d’amélioration sont identifiés pour mieux superviser l’étape suivante.
Les différents intervenants ont des rôles spécifiques et, contrairement à ce qui est préconisé en AGILE, sont regroupés sous les notions de MOA, MOE et Centre de Service Banque. Dans un contexte métier et projet dense, l’activité rencontre diverses difficultés notamment la coordination de tous les intervenants du projet mais aussi la priorisation des sujets à réaliser. L’objectif est, en premier lieu, de faire fonctionner correctement le futur applicatif puis de couvrir au mieux les attentes utilisateurs dans un contexte AGILE, qui est un nouveau mode de travail pour 100% des acteurs. Le plus souvent des solutions sont identifiées rapidement par le biais des rétrospectives et appliquées dès le sprint suivant. Ainsi les situations de blocages éventuels sont limitées.
Elsa P.