UBS ou la politisation des flux financiers
Le 8 novembre 2018, une plainte portée contre UBS est jugée au Parquet national financier, le verdict du 19 février 2019 un réel choc, environ 3.7 milliards d’euros d’amende accompagné de 800 millions euros de dommage et intérêts pour UBS. Quels sont les éléments qui ont motivé une telle sanction ?
Les agences bancaires 2.0 : l’innovation au service du client…et de la rentabilité
UBS, banque suisse, a été accusée d’avoir envoyé à Paris des personnels suisses afin de démarcher des résidents français, ce qui est étonnant vu que UBS possède une antenne à Paris boulevard Haussmann. En réalité les faits reprochés ne sont pas tant la tentative compréhensible pour une entreprise d’élargir le nombre de ses clients que les possibilités offertes. En effet, certains produits UBS sont depuis longtemps considérés comme des produits d’évasion fiscale. Ce n’est donc pas un événement ponctuel qui a lancé la procédure mais une revue profonde du fonctionnement d’UBS, dorénavant perçue comme structurellement orientée en faveur de l’évasion fiscale. La justice a déclaré qu’UBS était « pénalement responsable des faits de démarchage et de blanchiment aggravé qui trouvent leur source dans une organisation intégrée, verticale et systémique ». La méthode d’UBS était relativement simple, intégrer des cercles d’activité de l’élite française (parties de chasse, rencontre sportive de charité, …) et proposer des services d’évasion fiscale en toute légalité. UBS a déclaré avoir renoncé à certaines pratiques tout en déclarant ne jamais avoir franchi la ligne rouge.
Un verdict contesté
Ce jugement peut être considéré à raison comme un retour de bâton face à une inclination maligne d’une institution bancaire à inciter sa clientèle à la fraude, cependant, UBS avait déjà été condamné en 2014 pour les mêmes motifs mais pour une somme bien moindre, 1.1 milliard d’euros. Cette fois, selon UBS, aucun élément concret n’ayant été présenté, UBS a donc fait appel de la décision rendue par le Parquet national financier : « Aucune preuve n’a été apportée qu’un client français ait été démarché sur le territoire français par un chargé d’affaires d’UBS AG dans le but d’ouvrir un compte en Suisse ». Cependant, les tribunaux français semblent déterminés à sévir, plusieurs dirigeants menacés de prison. La sévérité de la sanction est d’ailleurs montrée de doigt par la Suisse, mais on oublie que d’autres pays ont déjà adopté des sanctions sévères. La Société Générale a été condamné à hauteur de 1.3 milliard de dollars par les Etats Unis pour financement du terrorisme et BNP a été accusé à payer 9 milliards de dollars pour le même motif, la France était l’une des seules grandes nations à condamner les banques à payer des sommes insignifiantes (3000 euros), lors d’une affaire de détournement fiscal opérée par la BNP … en Suisse ! Cette faiblesse des montants était d’ailleurs perçue par certains pays comme une absence volontaire d’effet dissuasif orchestrée par le pouvoir français.
Une actualité tumultueuse
Face à cette décision perçue en suisse comme un scandale, les politiciens suisses n’ont pas tardé à réagir, très divisés par cette affaire. La droite suisse soutient complètement sa banque, affirmant que la France opère une chasse aux sorcières et souhaite politiser le marché bancaire. Cette même droite rappelle de manière volontairement provocatrice que de toute façon « la loi Suisse permet aux entreprises de déduire les amendes de sa déclaration d’impôt ». La gauche Suisse quant à elle dénonce une « bêtise » des dirigeants d’UBS, des procédures extra judiciaires avaient été mises en place depuis 2014 qui auraient pu coûter bien moins cher à la banque Suisse. La pression est maintenant portée sur le parlement Suisse qui doit justement statuer sur le maintien de la loi permettant d’exonérer les entreprises de certaines amendes. La pression est également portée sur le gouvernement Suisse, La France a contacté la Suisse afin d’accéder à certaines informations actuellement indisponibles au nom de l’entraide administrative pour avoir les titulaires des comptes concernés, le gouvernement Suisse a accepté avant de se rétracter suite à un véto d’UBS. L’affaire entre le gouvernement suisse et UBS sera jugée par le tribunal fédéral de Berne.
Loïc K.